Pierre-Emmanuel Denys

Disappear here

Topaz

Il n’y a pas de meilleur compliment à faire à Ryu Murakami que de dire de lui qu’il est l’écrivain de l’adolescence. Non pas celle, mièvre et morne, de ces enfants bien élevés qui continueront à briller dans le respect d’autrui et l’abnégation devant la machine hideuse de leur vie, mais celle qui ne peut s’empêcher d’être excentrée. Bizarre, à côté de la plaque, dangereuse aussi, cette adolescence que Murakami continue de suivre jusque dans la vie de ces adultes qui parfois se sont élevés socialement (les Monologues) parfois se sont abîmés dans la déchéance (Bleu presque transparent) ou sont retournés à leur état de larve (Parasites).

L’humanisme dont Murakami se réclame se situe exactement là : dans la considération de ces existences décentrées, qui le restent. Même dans la banalité des existences de Parasites se niche encore cette part cachée, maudite, que Murakami se plaît à révéler. Topaz ne fait pas exception et retrouve dans la psyché d’une call girl le mélange interdit du plaisir le plus sensuel qui soit avec le romantisme d’une jeune femme ignorante des choses du sexe — quand bien même elle raconte avec humour sa sodomie par un nain à la bite large. Love & Pop se chargera de raconter les origines de ces existences qui finiront dans Tokyo Decadence et dont Topaz a été la source d’inspiration.